AVANT PROPOS
- Me suive qui voudra, m'accompagne qui le souhaitera, me
dépasse qui pourra, me conteste qui préfère : je n'ai aucun désir d'imposer
mes vues.
(p.11)
Chapitre 1 TECHNIQUE DE LA PRÉVISION
-
« Gouverner c'est prévoir » ; cela a toujours été vrai, mais
maintenant on pourrait dire que la fonction essentielle, la mission primordiale
des gouvernements, c'est de prévoir, de calculer l'avenir.
(p.17)
-
Penser l'avenir n'est pas naturel ; penser l'avenir est un
fardeau ; penser
l'avenir est créateur d'angoisse. [...] : il n'est pas impossible que le trait
déterminant de l'époque (note : du Bas Empire, l'Empire romain) ait été la
découverte de l'espace temporel, et l'accablement qui accompagne cette
découverte ; Car la première révélation, et finalement la seule certitude,
qu'apporte cette découverte, c'est pour chacun la pensée de sa propre mort.
(p.18)
-
Contre la pensée funèbre, l'Occidental dispose de plusieurs
prophylaxies : la foi en l'immortalité de l'âme, l'immortalité du nom, la
prolongation de la personne dans son œuvre, dans sa postérité ; le
diverstissement. Pour retrouver la gaieté di primitif, l'Occidental est obligé
de se créer un temps hors du Temps entre parenthèses dont le Temps est absent,
un temps périodique non-dimensionnel : le temps de la Fête.
Mais de toute façon l'adulte blanc ciilisé est un malade
du Temps.
(p19)
-
Peut-être le plus grand apport du christianisme à la civilisation a-t-il été
de fournir à l'humanité tout entière un point de repère temporel commun.
(p.21)
-
Il y a incompatiilité, contradiction entre la vérité d'une prophétie et son
utilité : ou bien elle est vraie, et elle ne sert à rien; ou bien elle sert,
mais elle celle d'être exacte; elle n'est plus, au mieux, qu'un avertisseemnt
de l'ordre rationnel.
...
La contradiction fondamentale entre la vérité de sa prophétie et son utilité
est à 'origine de la notion de destin, ce destin auquel on n'échappe pas quoi
qu'on fasse.
Donc, à supposer que le don de voyance existe, il ne peut, en quelque sorte par
définition, servir à rien — qu'à faire son testament.
(p.22)
-
C'est de l'astronomie que nait la notion que les phénomèrnes naturels sont
régis par les lois — que donc ils sont calculables et prévisible.
Aujourd'hui encore, le seul critérim certain d'une connaissance scientifique
est la constatation A postériori de ce qu'elle a permis d'annoncer
a priori .
(p.23)
-
Curieusement, l'Occidental se révolte à l'idée de devoir se réintégrer à
l'ordre des choses déterminées et prévisibles. Il n'aime pas s'envisager
lui-même sous la forme d'un phénomène biologique et statistique. L'idée de
personnalité est indissolublement liée, dans son esprit, à ce qu'il appelle sa
liberté, qui sous un certain angle se ramène à la non-prévisibilité. Il est
prêt, parfois, à des actes absurdes, et jusqu'au suicide pour essayer de
prouver q'il n'est pas déterminer. Et c'est en effet le grand « challenge » de
la conscience occidentale que cette contradiction : avoir inventé l'esprit
scientifique, qui repose sur le déterminisme et la prévisibilité absolue, et
affirmer en même temps sur le plan moral la lberté de l'individu, son
imprévisibilité et sa responsabilité. Comment concilier les deux ?
(p.26/27)
-
Franz Kafka, employé d'une compagnie d'assurance à Prague, avait compris que le
système de l'assurance s'inscrit dans la lignée des méthodes de prévision de
l'avenir, cette lignée dont l'ancêtre est la sorcellerie : « Le système des
assurances, disait-il ressemble à la réligion des peuplades primitives qui
croient pouvoir détourner le malheur par toutes sortes de manœvres»
(p.33)
-
...une puissance qui a fait de la planification son idéal et sa doctrine (le
système soviétique par exemple) ne peut que tendre à un contrôle, au moins
économique, de la planète entière : la planification en serait idéalement
simplfiée.[...] Il y a au fond du planisme, fatalement, une tendance
totalitaire, non point pour des raisons politiques, mais pour des raisons
techniques parfaitement valables : le souci de ne pas se tromper dans ses
calculs prévisionnels.
(p.35/36)
-
Lénine, doscople de Clausewitz, disait que le marxisme, n'est pas une théorie,
mais une méthode pour l'action[...] Le temps ne compte pas, à partir du moment
où l'on considdère l'avenr comme ouvert...
(p.38/39)
-
L'opposition entre l'Es et l'Ouest, entre le monde dit communiste et le monde
dit libre, réside pour une part infiniment plus importante qu'on ne le croit
dans une conceptiondifférente de l'avenir et dans une conception propre à
chacun, des méthodes de prévision de l'avenir.
(p.40)
Note : à lire l'intégralité du dernier sous chapitre 1 : La rétroaction qui est vraiment trop long pour être recopié en totalité: 6 pages à peu près. Mais cela vaut la peine d'être lu !!!
Chapitre 2 DONNÉES NOUVELLES
-
C'est l'un des aspects de l'accélération de l'histoire, que la révision
fondamentle des procédés de pensée devient de plus en plus nécessaire, et de
plus fréquemment, et qu'elle interfère de plus en plus avec notre existence
quotidienne;
(p.47)
-
Encore du temps de nos grands-pèrees, il pouvait suffre de faire dans sa
jeunesse de bonnes études, on acquérait alors un bagage intellectuel pour la
vie.[...]
Maintenant, c'est presque tous les dix ans qu'il faudrait renouveler notre
équipement intellectuel. Il n'est pratiquement plus rien, pas même les
mathématique, qu'on puisse maintenant apprendre une fois pour toutes.
Mais celui qui ne suit pas le mouvement s'exclut, par cela même, du mouvement
de la communauté humaine.[...]
Rester souple d'esprit comme de corpss a toujours été souhaitable; dans les
circonstances actuelles, c'est vital.
(p.48/49)
-
L'angoisse qui étreint maint de nos contemporains, c'est dans une large mesure
la crainte de ne plus être capables; demain, de faire face.
(p.49)
-
Les traquilisants, chimiques ou mentaux peuvent résoudre des problèmes
individuels : ils ne constituent par une solution humaine de l'angoisse. Le
vrai remède, c'est de comprendre ce qui se passe. (Je n'ai qu'une raison
décisive d'être antimilitariste ; c'est d'avoir trop souvent entendu dire à
l'armée : « Faut pas chercher à comprendre. » Renoncer à comprendre, c'est
renoncer à être homme.)
(p.49)
-
Par le choix qu'il fait des valeurs qu'il elimine et de celles par quoi il les
remplace, chacun détermine et définitla place qu'il prend, la position qu'il
adopte, lui personnellement, pzr rpport au mouvement généram de l'humanité, à
un moment où ce mouvement prend une telle ampleur et une telle accélération
qu'il n'est guère d'existence indivduellte qui n'en soit pas affectée.
Ce n'est pas même se refuser à participer à l'aventure en se tenant à l'écart;
c'est se résigner à n'y participer que passivement, comme le bouchon balloté
sur la vague; sans même cette joie intense que donne, au moins, la conscience
de l'aventure.
(p.51)
- L'humanité est en train d'acquérir — — ce qui était impensable il y a seulement
une vingtaine d'années — le redoutable pouvoir d'agir sur le destin de l'espèce,
et cela de deux façons au moins : soit en la détruisant, soit en la modifiant.
(p.55)
-
Cela étant du domaine du possible, ce ser, un jour, chose faite.
[...] Ce sont des scrupules qui arrêtent certains un temps, pas tout le monde
pour toujours. Tout ce qui est possible est, quelque jour, quelque part, tenté ;
la seule question étant : quand, comment, par qui cela sera-t-il fait ?
(p.57)
-
Il y a, dans le « vivant » une « intelligence » certainement plus semblable
à la notre que nous ne l'iùaginons généralement.
(p.60)
Chapitre 3 RÉVISION NÉCESSAIRES
-
Une affirmation n'est valable que dans le mesure où elle est précédée de
l'indication du système de coordonnées auquel on se réfère, par rapport auquel
on situe cette affirmation ; la définition préalable du « systèmr de
référence, » quelque chose comme,en musique, la clef du « sol » ou la clé du
« fa ».
(p.68/69)
-
La vitalité d'une civilisation se mesure à la vitalité de ses mythes. Se
régénérer, c'est renouveeler ses mythes.
(p.68)
-
Nos questions nous caractérisent plus exactement encore que ne le font les
réponses que nous leur apportons.
Le progrès humain, c'est davantage encore le progrès des questions posées que
le progrès des réponses apportées.
(p.85)
-
Dieu est muet. Il s'abrite derrièe le mystère. Aussi fut-il bien que désormais
on en reste à la question, et que l'homme ce grand nihiliste de l'univers,
réduise tout en problèmes.
(p.86)
-
L'anthithèse entre humanisme et technique : un vieux bateau. Comme si la
technique n'était pas, elle aussi humaine, et même précisément une
caractéristique, sinon la caractéristique principale, de l'homme; comme si
l'homme, sans sa technique, était encore l'homme.
L'humanisme a pris au cours des âges trois formes, apparue succssivement, mais
vivent aujourd'hui côte à côte.
La plus ancienne forme de l'humanisme, c'est l'humanisme de l'homme tel
qui doit être; tel qu'il doit être pour échapper à l'animalité. [...]
La seconde forme, c'est l'humanisme de l'homme tel qu'il est. [...].
Et voici qu'apparaît un troisième humanisme, celui de l'homme qui devient.
(p.89/90/91)
Chapitre 4 FIN DE L'HISTOIRE
-
Dès à présent les conséquences de la densification humaine sont telles que
l'échele des valeurs est modifiée. Ce qui jadis appartenait à tous le monde,
devient, pour le civilisé, le comble du luxe. Dans nos collectivités urbaines
déjà la hiérarchie des valeurs est inversée, il faut placer tout en haut de
l'échelle comme le bien le plus précieux ce que l'on considérat naguère encore
comme des dons gratuits et sans valeur : l'air pur, l'eau de source, l'espace,
le silence, le loisir ; ces biens primordiaux dont dépend la sommeil des
humains, leur équilibre mental et social.
(p.127)
Chapitre 5 LA GUERRE ET LA PAIX
-
Le principal mécanisme spontané de rétablissement des équilibres, d'élimination
des structures périmées, de rajeunissement et d'adaptation de l'humanité aura
été, pendant la phase historique, la guerre.
(p.123)
-
La guerre, on sait ce que c'est. Il y a des guerres ; on les nomme, on les
énumère. La guerre est une chose, et qui se laisse définir concrètement. On
sait entre qui et qui se fait une guerre. On distingue une guerre d'une autre
guerre. On dit « une guerre ».
Mais on dit « la paix ». Il n'y a pas une paix et une autre paix encore. La
paix n'est pas un objet isolable, définissable. Elle n'est que l'absence de
guerre ; notion négative. Il n'y a qu'une seule paix, la même, dont le règne
s'entrecoupe de guerres - à la façon dont la Nuit sidérale, universelle,
primordiale, sur Terre s'entrecoupe de jours.[...]
La guerre étant « quelque chose », on peut vouloir la guerre. Mais on ne peut
pareillement vouloir la paix. On ne peut que la souhaiter, s'efforcer de la
maintenir ou de la rétablir. Pour déclencher la guerre, il suffit de la
volonté d'un seul des deux adversaires.[...]
De même qu'on dit une guerre, mais qu'on dit : la, on dit :
une maladie, mais on dit la santé. Comme il n'y a qu'une santé,
il n'y a qu'une paix. Comme sa santé est une absence de malade, la paix
est l'absence de guerre.[...]
On ne vaccine pas contre la guerre.[...]
Il est absolument indispensable de regarder bien en face le phénomène sans
fausse pudeur ; de le considérer comme une fonction naturelle de l'organisme
humain collectif.[...]
(p.123/127)
NOTE : je ne peux que conseiller aux lecteurs de ce chapitre de le lire
dans son entièreté....entre la page 123 et 139.
Chapitre 6 MACHINE À PENSER, MACHINES À GOUVERNER
-
« Des machines à penser ? Vous voulez rire ; l'homme seul pense, et il en sera
toujours ainsi », disait-on encore récemment, Je tairai par charité, les noms
de ceux qui s'exprimaitent ainsi naguère.
(p.141)
-
En quelques années les machine éléctroniques sont passées du stade du simple
calcul à des opérations d'ordre intellectuel ; en fait, toutes les opérations
réductibles à l'information numérique et au raisonnement logique.
(p.141/142)
-
Logique, mémoire,imagination, attention, accumuation de l'expérience,
correction des erreurs...n'est-ce pas penser ?
(p.142)
-
En tout cas, outil ou machine, le propre de la trouvaille humaine est
l'associaton, la combinaison, l'intégration d'éléments divers en un seul
instrument ; leu appareillage. C'est en cela que réside la méthode, la
technique.
(p.147)
-
Mais les civilsation d'Afrique noire on refusé refusé la roue comme
moyen de transport. Une civilisaton se caractérise autant par son refus
d'adopter certaines techniques, que par les techniques qu'elle adopte.
Pourquoi refuser la roue ? Parce que la roue n'a de sens et d'utilité que quand
il y a une route pour rouler dessus ; ou au moins un chemn assez large.
(p.149)
-
De même un jour prochain nos langages disposeront de deux vocables différents
pour désigner deux formes de pensée : la pensée organique, à l'aide du cerveau
- et la pensée à l'aide de la machine.
(p.159)
-
Plus l'humanité sait des choses, moins elle sait qu'elle les sait; ce qui est
une nouvelle forme d'ignorance.
(p.165)
-
Savoir ce que sait « l'autre » mieux que « l'autre » ne sait ce qu'on sait
soi-même peut être un avantage décisif.
(p.166)
-
Cependant le langage n'a pas qu'une fonction d'instrument de communication. Il
sert aussi à d'autres activité : l'enregistrement de l'information d'abord -
mais ce n'est encore là qu'une forme de l'enregistrement ; simplement une
communication à travers le temps, et non plus à travers l'espace, ce qui ne
pose pas de problème nouveau.
Mais il servira aussi à la manipulation des concepts représentés par les
mots : le raisonnement par exemple. La pensée n'est en fait guère autre chose
que la manipulation des concepts contenus dans les mots ; donc en dernier
ressort une manipulations des mots.
(p.175/176)
Chapitre 7 L'ÉTERNEL FÉMININ
-
Le fond de l'être vivant, sa matière fondamentale, la base biologique, c'est
l'être féminin. L'être masculin n'est qu'un accident. [...] Le Féminin est la
Nature, le masculin l'Histoire.
[...]
(p.187.188)
-
Affectivement, l maternité est un fait biologique fondamental, la paternité,
n'est qu'un fait social et secondaire.Pater is est, quem nupt: ae
demonstrant. Le père c'est l'époux de la mère.
(p.193)
-
La cadence de développement d'un groupe humain donné est rigoureusement
déterminée, à la longue, par la cadence de développement de son élément
féminin.
(p.198)
-
C'est des femmes, et d'elles seules que dépendra - qu'a toujours dépendu - la
stabilité du groupe animal qu'est l'espèce humaine.
(p.202)
NOTE : je ne peux que conseiller aux lecteurs de ce chapitre de le lire dans
son entièreté....entre la page 187 et 209.
Chapitre 8 LA JEUNESSE
Chapitre 9 EFFETS DE LA DENSIFICATION
Chapitre 10 LA PERSONNA
-
Vieillir, c'est devenir la caricature de soi-même.
(p.252)
Chapitre CONCLUSION : AVOIR DE L'AVENIR DANS L'ESPRIT
-
[...]S'il est exact que l'humanité soit une espèce en cours de mutation, il ne
reste qu'à en prendre son parti, et tâcher de faire bonne figure dans le
processus. Fata volentum ducent, nolentum trahunt. [NOTE : traduction en
français de cette phrase latine, par Google translate : "Le destin guidera ceux
qui le veulent, il entraînera ceux qui ne le veulent pas."]. Il vaut mieux ne
pas se laisser traîner âr son destin, mais aller vers lui la tête haute et en
la regardant où on met les pieds. Ne pas « entrer dans l'avenir à reculons »,
disait Paul Valéry.
Tant qu'à faire, il vaut mieux comprendre, accepter, aimer son destin. C'est
la seule façon de ne pas gâcher sa vie. C'est aussi la meilleure façon de
franchir la barre à l'embouchure des fleuves : en l'abordant de face.
(p.269)
-
Lorsqu'il s'agit de notre existence, c'est son cours lui-même, et non son terme,
qui est le « but », ce qui lui donne son sens.
(p.271)
(Éditions Payot, Paris 1964. Lu dans la collection "Petite bibliothèque Payot" n° 60)
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